Lundi, 23.01.2023

Cuisine saine dans la restauration

Végane, jeûne ou « High Protein »? La grande tendance du « manger sain » est complexe. Stefan Siegenthaler, diététicien ASDD, expert Gastronomie & Santé de Pro Culina GmbH, classe ce qui est pertinent pour la restauration.

Le sucre est considéré comme mauvais pour la santé. Comment le remplacer en cuisine?

Inutile de remplacer le sucre car du sucre reste du sucre, que ce soit du miel ou du sirop d’érable. En revanche, il est judicieux de proposer des boissons non sucrées et sans sucre. Ou bien de servir des petites portions de mousse au chocolat ou de cheesecake. Pour le bilan calorique, cela fait une grande différence.

 

Qu’en est-il du sel?

Nous consommons deux fois plus de sel que ce qui est recommandé. Les sources les plus fréquentes sont les pâtisseries, les produits carnés, la charcuterie, le fromage et les plats préparés. Il est primordial de goûter les produits convenience avant de les assaisonner. Souvent, ils sont déjà salés. Pour les recettes maison, il ne faut pas assaisonner « selon son goût », mais respecter des quantités définies qui peuvent être rectifiées si besoin. C’est le seul moyen d’agir véritablement.

 

Que faire pour éviter trop de gras?

Il est utile de distinguer les graisses visibles de celles qui ne le sont pas. Le gras invisible se cache dans la charcuterie, les pâtisseries, le fromage et les confiseries. La restauration peut proposer ces aliments moins souvent et uniquement en petites portions. Le gras visible s’utilise pour la cuisson, les sauces à salade ou sous forme de matière grasse à tartiner. Ici aussi, on peut décider de mettre à la carte des plats nécessitant un mode de cuisson sans graisse et de cuisiner avec des huiles végétales de qualité, comme l’huile de colza et d’olive. La composition, la proportion et l’utilisation des différentes graisses sont déterminantes pour une cuisine équilibrée et une alimentation saine.

« Il n’y a pas d’aliment bon ni mauvais pour la santé »

 

Le fameux « Escalope et frites », plat typique des bistrots, est-il encore d’actualité ou mauvais pour la santé?

Je réponds par une question: qu’est-ce qui est bon pour la santé? Il n’y a pas d’aliments bon ni mauvais pour la santé, mais des habitudes alimentaires qui le sont plus ou moins. Si un client consomme chaque jour une escalope et des frites, alors son alimentation n’est pas équilibrée. S’il mange une escalope une fois par semaine, en portion normale et accompagnée d’une salade, ça se présente déjà mieux.

 

Cela fait-il une différence si l’escalope est préparée maison ou si elle passe du congélateur à la friteuse?

Impossible de généraliser. Il se peut que des aliments surgelés, congelés directement après récolte et soigneusement préparés soient plus nutritifs que des produits prétendument frais qui ont passé des jours à être acheminés du champ jusque dans la poêle. Que l’escalope soit panée maison ou pas, ça ne change pas grand-chose. Concernant les produits transformés, la liste des ingrédients, la qualité des graisses utilisées, la valeur nutritionnelle finale et la taille de la portion dans l’assiette sont déterminantes pour la santé.

 

En d’autres termes: comment les restaurateurs et restauratrices peuvent-ils faire en sorte que leur cuisine soit « saine »?

La planification des menus joue un rôle primordial. D’après les recommandations de la Société Suisse de Nutrition SSN, un repas équilibré compte deux cinquièmes de légumes, salade et fruits, environ deux cinquièmes d’aliments riches en amidon et un cinquième de produits riches en protéines. Idéalement, ces derniers doivent provenir de viande deux à trois fois par semaine, et sinon de végétaux. Il va de soi que les menus classiques du midi comme les spaghetti carbonara ou le rösti avec saucisse ne correspondent pas à cette assiette optimale. Si vous proposez des alternatives, comme un plat de légumes avec du tofu et du riz ou une salade en complément ou encore une salade de fruits en dessert, vous offrez des possibilités d’équilibrer.

« Une cuisine saine, c’est une bonne planification »

 

Quels professionnels prennent la responsabilité de devoir proposer une cuisine équilibrée?

Les actrices et les acteurs de la restauration collective ont clairement une responsabilité de proposer une offre de restauration bénéfique pour la santé. On estime à près d’un million le nombre de personnes qui, chaque jour en Suisse, mangent dans des établissements de restauration d’écoles, d’hôpitaux, de maisons de retraite et d’entreprises. Etant donné que beaucoup de personnes sont contraintes de se restaurer sur leur lieu de travail, c’est, pour ainsi dire, un devoir de proposer des repas équilibrés. Dans les établissements médico-sociaux, les résidents mangent sur place trois fois par jour. Ces cuisines ont davantage de responsabilités qu’un food truck de restauration privée, par exemple.

 

La restauration privée est-elle tenue de proposer une nourriture saine?

Ce qu’elle doit ou peut faire dépend des besoins de la clientèle qu’elle souhaite satisfaire. Dans la restauration classique, le service est placé au premier plan. Les professionnels se plient à ce que souhaite la majorité de la clientèle. La loi sur les denrées alimentaires contraint à préserver la santé des consommateurs et à les protéger contre les tromperies, à manipuler les aliments de manière hygiénique et à informer et renseigner sur les denrées proposées. Une bonne pratique, l’honnêteté et la transparence sont primordiales. Très souvent, il existe un réel potentiel d’optimisation au niveau de la carte pour les enfants. Si les parents disposent d’une belle sélection de plats équilibrés, les enfants ont le choix entre des nuggets de poulet ou des spaghetti napoli. Il serait plus pertinent de proposer des « plats d’adulte » équilibrés en portion enfant.


Texte: Simone Knittel
Photo: Merlin Photography Ltd